Jean-François, vigneron belge épanoui en Occitanie

C’est dans la commune de Mauroux, charmant village du sud-ouest de la France, que se cache une famille de vignerons pas comme les autres, la famille Meyan. Passionné depuis toujours par l’univers viticole, le couple Meyan a fait le choix le quitter sa Belgique natale il y a plus de 20 ans avec un seul objectif en tête : éveiller les papilles gustatives des amateurs de vins. Rencontre avec Jean-François Meyan, propriétaire du Château Latuc.

Cela fait maintenant plus de 15 ans que vous avez investi le vaste domaine viticole de Latuc, à Mauroux. Pourquoi avoir choisi de vous installer sous le soleil du pays de Cahors ?

On a choisi cette région car nous recherchions vraiment une région qui possède un lien fort avec la terre. Les gens sont assez terriens, plutôt très accueillants. Il y a vraiment une entité, on s’y en sent bien.

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D’où vous vient cette passion pour le vin ?

A l’âge de 13 ans, j’ai reçu une bouteille d’un bon Bordeaux. Quand on reçoit ce genre de cadeau à cet âge-là, on se demande bien ce qu’on va pouvoir en faire, c’est un peu bizarre. Mais pour moi, ce fut un déclic assez magistral ! À partir de ce moment, j’ai commencé à m’intéresser au monde du vin en lisant des ouvrages sur le sujet. J’ai acquis une petite connaissance sur le vin et sur les différentes appellations.
La connaissance du monde viticole français est assez intéressante pour un Belge. En effet, on a une assez grande ouverture d’esprit, on ne se limite pas au vin d’une seule région. Ensuite, j’ai décroché un diplôme d’ingénieur agronome à Gembloux puis je suis parti étudier le vin en Alsace. A l’époque, le vin n’était pas encore très exploité en Belgique. Après cette année d’étude, je suis resté sept ans en Alsace, chez un vigneron au sud de Colmar.

Vous avez donc vécu pendant huit ans en Alsace. Que retenez-vous de cette région ?

C’est une région de prédilection pour le Belge. En effet, comme le Belge, l’Alsacien a été un peu balloté entre deux mondes, ça forge un caractère. Il y a beaucoup de similitudes. Les Belges s’y sentent un peu comme des poissons dans l’eau. La région en elle-même possède aussi de beaux atouts, comme les environs de Colmar et les châteaux forts qui sont incontournables.
te expérience nous a apporté une énorme ouverture d’esprit. On n’a pas peur de proposer beaucoup de vins à déguster. On n’a pas de barrière, ce qui rend notre production très éclectique. La diversité est salutaire, ça apporte du plaisir à la personne qui goûte et on arrive ainsi à toucher plus de monde.

En moyenne, vous produisez entre 40.000 et 80.000 bouteilles par année. Une telle productivité implique une certaine discipline. Comment décririez-vous une journée type du métier de vigneron ?

C’est difficile de décrire une journée type car le vigneron porte au moins dix casquettes différentes sur sa tête. Il faut aller à la vigne, être un leader, conduire le tracteur, faire du travail de bureau aussi, suivre les mails, les commandes, accueillir les clients et les journalistes, rencontrer les comptables, … C’est très diversifié !
Ce que je préfère c’est le contact avec le client, on vend 65.000 bouteilles en direct, on ne les vend pas dans des grandes surfaces. On a la chance de pouvoir discuter directement avec la personne qui dégustera notre vin et qui reviendra nous donner son feedback. Et comme les feedbacks sont souvent positifs, ça donne d’autant plus envie de s’y investir à plein temps.

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La qualité de vie est-elle différente de celle que vous avez connue en Belgique ?

Oui elle est clairement différente, mais il faut qu’on se force à s’arrêter de temps en temps pour en voir les côtés positifs. Depuis 15 ans, on a pris seulement 15 jours de vacances, on travaille tout le temps. Quand on commence une exploitation viticole, c’est très chronophage, surtout quand on essaie de tout vendre en direct. On fait par exemple une trentaine d’aller-retours en Belgique par an. Il faut donc se forcer à s’arrêter pour pouvoir profiter de cette qualité de vie.
Paradoxalement, on prend plus le temps pour se poser en été. En effet, en été, on a beaucoup de Belges qui nous rendent visite, de la famille ou des amis, ce qui nous impose de lever le pied un instant.

Vous avez remporté plusieurs médailles d’or lors des principaux concours en France et été mentionné dans le Guide Hachette. Comment avez-vous accueilli cette reconnaissance du monde viticole français ?

Bien sûr, ce genre de récompenses rattachées directement au produit que nous vendons nous fait plaisir, on est toujours content que des gens qui dégustent notre vin en aveugle le plébiscitent. Mais la reconnaissance la plus forte pour moi, c’est par rapport au métier. On se sent bien intégré dans le métier, via des mouvements comme les Vignerons Indépendants de France par exemple. On sent qu’on a vraiment notre place, qu’on soit Belge ou Français. On a su s’adapter à leur mentalité. En tant que Belge, on n’a pas cherché à s’imposer, on a été à l’écoute, on a posé des questions, tout en apportant notre joie de vivre, notre capacité à « faire la bringue ». L’intégration a été facile. Quand une personne n’est pas prise de haut, elle a tendance à être plus sympathique. Dans le village, nous sommes trois vignerons et c’est que du bonheur. Il n’y a pas de grosses rivalités. Je pense que l’union fait la force !

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Comment voyez-vous l’avenir ? Quels sont vos projets, objectifs ?

Mon objectif n’est pas vraiment d’augmenter l’exploitation mais plutôt de mieux vivre, de pouvoir prendre un plus de temps pour nous. On se dit qu’on ferait bien un gîte, qu’on accueillerait bien plus de personnes, … Il y a beaucoup de possibilités dans le département, que ce soit sur le plan oenotouristique, gastronomique, … On verra bien !

Quels sont pour vous les atouts de la région du Lot, en Occitanie ?

C’est une région qui a su garder son attractivité, sa douceur de vivre, … Côté atouts, il y a bien sûr la ville de Cahors et son pont Valentré qui est très beau. En dehors de Cahors, il y a aussi tous les petits villages médiévaux tout au long de la rivière Lot, qui sont un peu éloignés mais qui possèdent beaucoup de charme. La ville du Puy-l’Evêque par exemple est magnifique. On pourrait penser qu’il y a beaucoup de touristes mais c’est plutôt sous-exploité, du coup ça apporte un charme supplémentaire.